
Ezequiel Álvarez est chercheur au CONICET et professeur à l'UNSAM. Il a dirigé ce projet interdisciplinaire qui vise à prédire plus précisément les foyers de contagion, en atténuant leur expansion et en permettant une intervention plus efficace. "Nous espérons que ce développement aidera à prévenir les épidémies de dengue de manière agile et efficace", a affirmé ce matin Álvarez dans des déclarations radiophoniques.
Le développement sera utilisé dans la province de Buenos Aires, comme l'ont annoncé le gouverneur Axel Kicillof et le ministre de la Santé Nicolás Kreplak, dans le cadre de la présentation d'une série de mesures préventives pour faire face à la menace de la dengue dans la province.
En quoi consiste le développement de l'IA bayésienne

Le cœur du projet est l'implémentation de l'IA bayésienne, une technique qui permet d'inférer des grandeurs non observées à partir de celles qui sont visibles. "Dans la dynamique de l'épidémie de dengue, comme dans tout système, de nombreux processus se relient entre eux et dépendent de certaines grandeurs", a expliqué Álvarez. Des facteurs comme le climat, les cas signalés au cours des 20 derniers jours et les appels au numéro d'urgence 148 font partie des grandeurs observées que le système utilise pour effectuer ses calculs.
Ce qui est novateur dans le système, c'est qu'en alimentant le modèle avec ces données, l'IA peut inférer des grandeurs cachées, comme la quantité de moustiques infectés dans une zone spécifique ou le niveau d'élimination des récipients (la suppression des contenants où les moustiques peuvent se reproduire) dans une zone déterminée.
"On ne saura jamais le nombre exact de moustiques, mais on infère une distribution de probabilité. En faisant fonctionner le modèle, avec les données qui arriveront sur l'épidémie, nous espérons trouver que dans certains endroits cette distribution de probabilité sera plus élevée que dans d'autres, et cela sera clé pour prendre des actions rapides et efficaces avec des politiques publiques", a détaillé le chercheur.
Les développeurs du système estiment que cette capacité prédictive représente un outil important dans la gestion des épidémies, en particulier dans un contexte où la dengue a montré des pics inquiétants dans sa propagation. Le système apprend à partir des données historiques — il est désormais entraîné avec les données de l'épidémie de 2023 — et en temps réel, ajustant ses prévisions et offrant aux responsables de la santé publique des informations précises pour intervenir dans les points critiques avant que les épidémies ne s'intensifient.
Actions préventives et collaboration avec l'UNSAM

L'annonce du gouvernement provincial marque un changement dans la stratégie contre la dengue, une maladie qui a montré une augmentation alarmante ces dernières années. En plus des campagnes traditionnelles de vaccination et de sensibilisation du public, l'introduction de l'apprentissage machine dans la prévention des épidémies est espérée pour représenter une avancée significative.
Selon l'annonce, le système utilisera un modèle mathématique sophistiqué qui, à partir de l'information sur le climat, la densité de population et d'autres facteurs, permettra de détecter à l'avance les foyers où les moustiques porteurs du virus de la dengue pourraient se multiplier.
Le système analysera 400.000 pâtés de maisons dans les centres urbains, car la région densément peuplée est la plus vulnérable à la propagation de la dengue. À travers la collecte et le traitement de données climatiques, démographiques et épidémiologiques, le modèle sera capable d'identifier en temps réel les zones à risque élevé d'épidémie, selon ses développeurs. Cette précision permettra aux autorités sanitaires d'agir de manière ciblée dans des zones spécifiques et d'éviter la dispersion massive du virus.
L'équipe de recherche comprend non seulement des mathématiciens et des experts en intelligence artificielle, mais aussi des biologistes, des zoologistes et des épidémiologistes, tous coordonnés par Álvarez. "Le transfert de connaissance scientifique en santé et prévention est essentiel pour améliorer la qualité de vie", a souligné Pablo Palmaz, sous-secrétaire aux Relations Interinstitutionnelles de l'UNSAM, qui prévoit que l'impact de cette technologie sera clé dans la lutte contre la dengue dans les mois à venir.

Implications du développement dans les politiques publiques durant l'épidémie
L'implémentation de ce système permettra une prise de décision plus agile et localisée. Au lieu d'adopter des mesures génériques pour de vastes zones, le modèle offrira la possibilité de concentrer les efforts sur les zones où la probabilité d'épidémie est plus élevée.
Le ministre Kreplak a souligné que cette approche réduira non seulement le nombre de cas, mais aussi les coûts pour le système de santé en optimisant les ressources et en prévenant la propagation de la maladie. "Le ministère de la Santé pourra 'frapper' avec des mesures dans des zones précises, en allant dire aux gens comment procéder pour éliminer les récipients", a souligné Álvarez, qui a mis en avant l'importance d'impliquer la communauté dans la prévention.

De plus, à moyen terme, les projections indiquent que ce type de développement permettra non seulement de réduire l'impact immédiat des épidémies, mais contribuera également à une prévention continue.
En identifiant avec plus de précision les foyers de risque et en optimisant la distribution des ressources sanitaires, une diminution soutenue des cas est attendue au fil du temps.
Cela conduira également à une réduction des coûts à long terme, en évitant l'effondrement des services d'urgence et en minimisant la nécessité de traitements prolongés. Comme l'a souligné Palmaz, ce type de transfert de connaissance scientifique renforcera les politiques publiques de santé, rendant les interventions plus efficaces et mieux protégeant les communautés vulnérables.